Distr.

GENERALE

CRC/C/SR.185
13 janvier 1995


Original: FRANCAIS
Compte rendu analytique de la 185ème séance : Philippines. 13/01/95.
CRC/C/SR.185. (Summary Record)

Convention Abbreviation: CRC
COMITE DES DROITS DE L'ENFANT

Huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 185ème SEANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,
le mardi 10 janvier 1995, à 10 heures.

Présidente : Melle MASON


SOMMAIRE


Examen des rapports présentés par les Etats parties

- Rapport initial des Philippines





__________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également portées sur un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications éventuelles aux comptes rendus des séances publiques de la présente session seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la clôture de la session.



GE.95-15099 (F)
La séance est ouverte à 10 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES (point 4 de l'ordre du jour)

Rapport initial des Philippines (CRC/C/3/Add.23; CRC/C.7/WP.3)

1. Sur l'invitation de la Présidente, Mmes C.A. DE LEON, PEFIANCO, REODICA, Y.L. DE LEON, GUTIERREZ, CARABALLO, LIM YUSON, LUCIANO, AQUINO ORETA, SOLIVEN, BALANON, PALALA et MM. YAMBAO et CONFERIDO (Philippines) prennent place à la table du Comité.

2. Mme C.A. DE LEON (Philippines), présentant le rapport initial des Philippines (CRC/C/3/Add.23), souligne que la délégation qu'elle dirige a été composée de façon à représenter les organismes du gouvernement chargés du développement social et en particulier de la protection de l'enfance, et s'efforcera de compléter les renseignements portés dans le rapport.

3. Mme de Leon fait observer tout d'abord que les Philippines disposent d'une base législative solide en matière de promotion des droits de l'enfant. Depuis la ratification de la Convention, le Gouvernement philippin a adopté diverses lois qui viennent s'ajouter au Code pour la protection de l'enfance et de la jeunesse, fondement du Plan d'action pour les enfants des Philippines. On peut par exemple citer la loi sur la non-séparation des enfants et des mères dans les hôpitaux et l'allaitement naturel, visant à donner à l'enfant les meilleurs soins possibles dès la naissance, la loi sur la protection et le développement total des enfants dans les villages (barangay), dont l'objectif est la création d'une garderie dans chacun des 42 000 villages du pays, la loi de 1991 relatives aux pouvoirs locaux, et la loi sur la protection spéciale qui vise à protéger les enfants contre toute violence, discrimination ou exploitation.

4. Depuis la rédaction du rapport initial de nombreuses réalisations ont été faites : ainsi dans le domaine des libertés et des droits civils, l'enregistrement des naissances s'est considérablement amélioré, puisque 85 % des naissances sont désormais enregistrées.

5. L'accent a également été mis sur le droit des enfants d'être entendus dans le cadre de l'élaboration des politiques et des programmes les concernant et c'est ainsi, par exemple, que la loi relative aux pouvoirs locaux prévoit que des représentants des jeunes assistent aux travaux de tous les organes législatifs ainsi que de tous les organes de planification. Une fondation a également été créée afin de récompenser les enfants ayant accompli des actes héroïques au sein de leur communauté, et des enfants philippins ont élaboré une résolution sur "L'enfance et la paix", destinée au Sommet mondial pour les enfants qui aura lieu en juin 1995.

6. Dans le domaine du milieu familial et de la protection de remplacement, les Philippines ont réaffirmé, dans le cadre du Plan national d'action pour la famille, l'importance de la famille en tant que fondement de la société philippine et en tant que milieu principal et naturel pour la protection de l'enfance. Le renforcement de la famille et des valeurs familiales et le bénéfice de services sociaux globaux et intégrés sont inscrits à l'ordre du jour des réformes sociales prévues pour le pays. Concrètement, à la fin de 1994, il y avait aux Philippines 27 538 garderies, chiffre deux fois plus élevé qu'en 1992 mais encore insuffisant, et plus d'un million de Philippins vivant en milieu rural avaient bénéficié de mesures tendant à relever leur niveau et à augmenter les possibilités d'emploi dans le cadre d'un programme qui contribue à aider les familles à élever leurs enfants.

7. Les Philippines ont été à l'origine de la création de bureaux de protection de l'enfance dans les pays d'Asie et ont participé activement à l'élaboration de la Convention de La Haye sur la coopération internationale et la protection des enfants en matière d'adoption internationale. En outre, comme indiqué dans le rapport écrit, le Conseil pour le bien-être de l'enfant continue de jouer un rôle important dans la lutte contre les violences et autres crimes commis à l'encontre des enfants.

8. Dans le domaine de la santé, de la nutrition et du bien-être, l'objectif consistant à vacciner l'ensemble des enfants a été atteint et de grands progrès ont été réalisés dans le domaine de la nutrition et des installations de santé. Néanmoins, la lutte contre les maladies évitables par la vaccination, les maladies respiratoires aiguës et les maladies diarrhéiques, qui comptent parmi les principales causes de décès chez les nourrissons et les enfants, se poursuit. Un plan d'action pour l'approvisionnement en eau salubre devrait commencer à être mis en oeuvre en 1995. Par ailleurs, en cas de circonstances exceptionnelles, ou dans certaines provinces défavorisées, la fourniture d'aliments aux familles en difficulté et aux familles déplacées est assurée grâce à la collaboration du gouvernement, des ONG et du secteur privé. Enfin, un projet quinquennal visant la détection précoce, la prévention et le traitement des handicaps de la naissance à l'âge de six ans a été lancé en 1994 dans 15 régions.

9. Des réformes importantes ont également été mises en oeuvre afin d'assurer aux enfants philippins l'accès à un enseignement de qualité, aux loisirs et à des activités culturelles. Une attention particulière et des crédits budgétaires importants ont été accordés à l'enseignement primaire. Des mesures administratives ont été prises pour obtenir un taux de scolarisation minimum de 92,5 % chez les enfants d'âge scolaire et un taux d'achèvement du cycle d'enseignement primaire d'au moins 76,5 %. Des modules d'enseignement relatifs aux droits de l'enfant ont été incorporés aux programmes de l'enseignement primaire et de l'enseignement secondaire et des mesures ont été prises pour répondre aux besoins éducatifs des enfants des rues, des enfants qui travaillent, ainsi que des autres enfants en situation particulière. Des programmes extrascolaires d'alphabétisation ont été mis spécialement sur pied à l'intention des adolescents non scolarisés et des adultes, en particulier des mères de famille.

10. En ce qui concerne les mesures spéciales de protection, les dispositions relatives au travail des enfants de la loi sur la protection spéciale ont été modifiées, il a été tenu compte dans le Plan national de développement de la jeunesse des enfants en situation particulièrement difficile, un centre pour les droits de l'enfant a été créé sous l'autorité de la Commission des droits de l'homme et une section des relations avec les enfants et les adolescents a été ouverte dans divers commissariats de police du pays. Une formation permanente est dispensée aux fonctionnaires de police et des équipes de travailleurs sociaux opèrent dans les divers aéroports internationaux du pays afin d'éviter tout trafic d'enfants. Une équipe spéciale a été chargée d'améliorer la législation relative aux jeunes délinquants. Les jeunes détenus reçoivent régulièrement la visite de membres d'une association regroupant des organisations gouvernementales et non gouvernementales, et des travailleurs sociaux, aidés de volontaires, participent à leur réinsertion dans les communautés.

11. Des services nouveaux ont été mis en place pour les enfants; ainsi une aide psychologique est assurée aux enfants des rues victimes de violences sexuelles, prostitués, toxicomanes et délinquants et les enfants victimes de violence ont droit à une indemnisation et à une protection spéciale lorsqu'ils sont appelés à témoigner. On s'efforce de faire cesser les infractions à la législation relative au travail des enfants. Des services sociaux spéciaux sont également prévus pour les enfants appartenant à des communautés culturelles autochtones et les enfants ayant vécu des situations de conflit armé ou de catastrophe naturelle font également l'objet de soins particuliers. Le recensement des enfants issus de mère philippine et de père américain ou de père japonais a été entrepris en vue d'organiser des prestations à leur intention.

12. Dans le domaine de la coopération internationale, il convient de signaler que le Gouvernement suédois, en coopération avec l'organisation suédoise Save the Children, a approuvé un programme de formation de 25 travailleurs sociaux dans le domaine de la réinsertion des enfants victimes de violences sexuelles et de la prostitution. Le Gouvernement australien a également approuvé un programme d'aide alimentaire et éducative destinée aux enfants de la rue et à leurs familles.

13. Les ministères concernés ne négligent aucun effort pour lutter en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'enfant. Chacun s'est engagé à poursuivre dans cette voie car, si les progrès sont encourageants, le Gouvernement philippin a conscience qu'il reste encore beaucoup à faire.

14. La PRESIDENTE invite la délégation philippine à répondre à la section de la liste des points à traiter (CRC/C.7/WP.3) se rapportant aux mesures d'application générale, qui se lit comme suit :
"Mesures d'application générales
(Art. 4, 42 et 44 (par. 6) de la Convention)

15. Mme C.A. DE LEON (Philippines) précise que, afin de surveiller la mise en oeuvre de la Convention, le Conseil national pour le bien-être de l'enfant utilisera le système actuellement en vigueur pour surveiller la mise en oeuvre du Plan d'action pour les enfants des Philippines. Les organisations membres du Conseil national pour le bien-être des enfants ont présenté le programme des activités qu'elles entendaient mener dans le cadre du Plan d'action et sont tenues de présenter régulièrement des rapports sur la mise en oeuvre de ce dernier. La surveillance sera effectuée à la fois sur les plans national, régional, provincial et municipal. Le Conseil pour le bien-être de l'enfant sera assisté dans sa tâche par le Centre des droits de l'enfant de la Commission des droits de l'homme, qui se consacrera plus spécialement àla mise en oeuvre des dispositions de la Convention relatives aux libertés et droits civils, ainsi qu'au droit à bénéficier de mesures spéciales de protection.

16. En ce qui concerne la participation des ONG (question 2), un décret engage les autorités locales à encourager et à organiser la participation des organisations non gouvernementales à la mise en oeuvre du Plan d'action pour les enfants des Philippines. En 1992, plus de 40 ONG ont participé à un atelier d'orientation et de planification relatif au Plan d'action, organisé par le Conseil national pour le développement social. En outre, trois dirigeants d'organisations non gouvernementales font partie de la direction du Conseil pour le bien-être de l'enfant.

17. Passant à la question posée au paragraphe 3 de la liste, Mme de Leon dit que le Conseil pour le bien-être de l'enfant a organisé des conférences de presse au cours desquelles les conclusions et les priorités formulées dans le rapport du gouvernement au Comité des droits de l'enfant ont été présentées et débattues. Il a également mené, en collaboration avec la Commission des droits de l'homme de l'ONU, des consultations multisectorielles afin d'examiner les moyens de renforcer l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant. De plus, des exemplaires du rapport ont été adressés aux organes directeurs des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, aux comités régionaux pour le bien-être de l'enfant ainsi qu'aux organisations non gouvernementales, locales et internationales.

18. Pour ce qui est de l'information (par. 4 de la liste) aucune campagne nationale d'information sur les droits de l'enfant et l'application de la Convention n'a été faite par les organes d'information mais le Conseil pour le bien-être de l'enfant a entrepris de constituer des équipes, appelées les "avocats des enfants", qui seront chargées de faire connaître les droits de l'enfant, notamment par le biais d'activités théâtrales.

19. A propos de la formation (par. 5 de la liste), Mme de Leon indique que le Ministère de l'éducation, de la culture et des sports a mené des actions de formation à l'intention des éducateurs en collaboration avec la Commission des droits de l'homme. Celle-ci a également organisé des cours de formation sur les droits de l'enfant à l'intention des membres de la police nationale et du personnel pénitentiaire; à ce jour, 30 270 personnes en ont bénéficié. Le Conseil national du développement social a dispensé aussi une formation à son personnel et aux travailleurs sociaux.

20. S'agissant de la place de la Convention dans le droit interne (par. 6 de la liste), le 26 juillet 1990, le Sénat a, conformément à la section 21 de l'article VII de la Constitution, incorporé la Convention des droits de l'enfant au droit interne. Les dispositions de cet instrument peuvent donc être invoquées devant les tribunaux.

21. En ce qui concerne le rôle de la coopération internationale dans la mise en oeuvre de la Convention (par. 7 de la liste), le gouvernement met actuellement en oeuvre, en coopération avec l'UNICEF, un programme relatif à l'enfance, qui s'inscrit dans le cadre du Plan philippin d'action pour l'enfance et de la Déclaration mondiale en faveur de la survie, de la protection et du développement de l'enfant. Par ailleurs, en décembre 1993, les ministres de la protection sociale des pays membres de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est ont adopté, à Manille, un plan d'action en faveur des enfants, en vue de promouvoir la coopération régionale dans le domaine de la survie, de la protection et du développement des enfants d'Asie du Sud-Est.
22. La PRESIDENTE invite les membres du Comité qui le souhaitent à poser à la délégation des Philippines des questions sur les mesures générales d'application (par. 1 à 7 de la liste des points à traiter).

23. M. KOLOSOV voudrait en savoir davantage sur les problèmes concrets posés par la participation des ONG à la mise en oeuvre de la Convention, en particulier sur les sources de financement dont elles disposent, notamment pour agir dans les régions isolées où vivent des minorités où les besoins sont importants. Il se demande si la législation prévoit un soutien à ces ONG, de quelle manière le gouvernement encourage ces organisations et, enfin, s'il existe une coordination entre celles-ci.

24. Mgr BAMBAREN GASTELUMENDI souhaiterait savoir si dans le cadre de sa campagne d'information sur les droits de l'enfant, le gouvernement tient compte de l'extraordinaire diversité culturelle, ethnique, économique et linguistique du pays.

25. Mme SANTOS PAIS demande à quelles difficultés pratiques se heurte le Gouvernement des Philippines dans l'application de la Convention. Des précisions seraient bienvenues notamment sur le mode d'organisation du Conseil pour le bien-être de l'enfance, et sur les modalités de la coopération entre cet organe et la Commission des droits de l'homme en ce qui concerne les violations des droits de l'enfant. Elle souhaiterait également savoir dans quelle mesure le Plan d'action pour les enfants philippins tient compte des principes énoncés dans la Convention, notamment en matière d'interdiction de la discrimination et de respect des opinions de l'enfant.

26. Mme Santos País demande en outre à qui sont adressés les rapports sur l'application de la convention, si le Parlement les reçoit et en débat et si les recommandations formulées à l'intention du Président ont été suivies d'effets. Elle souhaiterait également savoir en fonction de quels critères le gouvernement collabore avec telle ou telle ONG et si ces organisations ont participé à l'élaboration du rapport.

27. En ce qui concerne les sévices infligés aux enfants, il serait utile de préciser si les auteurs de ces actes ont été poursuivis et punis et si les victimes ont été dédommagées. En particulier, la délégation des Philippines pourrait indiquer si dans la pratique, un enfant dont les droits ont été violés, notamment un enfant qui a été torturé, peut invoquer les dispositions de la Convention devant les tribunaux.

28. D'après un rapport de l'UNICEF publié en 1991, 40 % de la population du pays vivent au niveau ou au-dessous du seuil de pauvreté et 6 enfants sur 10 naissent dans des familles appartenant à cette catégorie de la population. Le gouvernement prend-il des mesures pour mettre en oeuvre les droits de ces enfants dans toutes les limites des ressources dont il dispose, comme lui en fait obligation l'article 4 de la Convention ? Il serait intéressant àcet égard de comparer les parts du budget national consacrées respectivement à l'enfance et à l'armée.

29. Mme BELEMBAOGO voudrait savoir si dans la pratique la collaboration entre le gouvernement et les ONG en matière de défense des droits de l'enfant fonctionne de manière satisfaisante et si la mise en oeuvre des programmes en faveur de l'enfance se heurte à des difficultés, notamment d'ordre financier. Il semblerait en effet qu'en matière de financement, il existe une importante disparité entre les différentes régions du pays. Le gouvernement a-t-il fait appel à d'autres organes que l'UNICEF pour résoudre ces problèmes financiers ?

30. La PRESIDENTE demande si l'exécution des nombreux programmes en faveur de l'enfance mentionnés dans le rapport a commencé et quels résultats concrets ont été enregistrés.

31. Il serait également souhaitable d'avoir des informations sur l'action concrète des organes créés pour recevoir les plaintes faisant état de violations des droits de l'enfant, et sur la sélection des "équipes d'avocats" de la cause des enfants, de façon à déterminer si les enfants issus des milieux les plus défavorisés ont une chance d'être bien représentés.

32. Mme C.A DE LEON (Philippines) dit qu'il existe deux grandes catégories d'ONG : d'une part, celles qui se consacrent véritablement à l'amélioration du sort des enfants en participant sur le terrain à la mise en oeuvre des programmes en faveur de l'enfance ou en recueillant des fonds permettant l'application de ces programmes et, d'autre part, les ONG qui visent des objectifs politiques, notamment le renversement du gouvernement. Les relations entre le gouvernement et cette deuxième catégorie soulèvent effectivement des problèmes.

33. C'est avec la première catégorie d'ONG que le gouvernement collabore de manière constructive. Une loi autorise les ONG à collecter des fonds et le gouvernement les aide à s'organiser et à coordonner leurs efforts, notamment par l'intermédiaire du Conseil national pour le développement social, de l'Association des institutions de soins aux enfants et de la Coalition des ONG qui s'occupent du développement. Il convient enfin de préciser que des ONG ont été associées à l'élaboration du rapport des Philippines.

34. Mme LUCIANO (Philippines) ajoute qu'en matière de législation, le Code pour la protection de l'enfance et de la jeunesse traite expressément des violations des droits de l'enfant, notamment des enfants abandonnés et des enfants victimes de mauvais traitements et de violences sexuelles. Par ailleurs, le Code pénal prévoit des sanctions à l'encontre des personnes qui infligent des sévices aux enfants. C'est ainsi par exemple que les parents qui commettent de tels actes se voient retirer temporairement la garde de leurs enfants, qui sont pris en charge par le Ministère du bien-être social. Si les parents ne s'amendent pas, ce ministère place alors les enfants menacés dans des familles d'accueil ou dans des établissements spécialisés ou prend des mesures en vue de leur adoption.

35. Plusieurs projets de lois sont également en cours d'examen, qui prévoient notamment la création d'une commission nationale de la jeunesse, laquelle sera chargée de veiller au respect des lois et des obligations des jeunes, et la création d'un conseil national chargé d'examiner l'influence de la télévision sur les enfants. Cet organe réglementera la présentation de scènes de violence et de sexe sur les écrans, dont on sait qu'elles sont l'une des causes des comportements violents chez des jeunes.

36. Un autre projet de loi prévoit l'élaboration d'une charte pour les étudiants en vue d'associer davantage ces derniers à la mise au point des mesures les concernant. Une nouvelle loi sera également adoptée afin de réglementer l'adoption d'enfants philippins par des étrangers.

37. D'autres projets de loi prévoient la réorganisation des tribunaux pour enfants, la création de centres de détention réservés aux jeunes délinquants pour éviter qu'ils ne soient incarcérés avec des adultes, et le renforcement de la protection des femmes et des enfants contre les violences au sein de la famille, notamment de nature sexuelle, qui d'après les statistiques sont en augmentation.

38. D'autres initiatives seront également prises afin d'améliorer le sort des enfants des rues, de créer des garderies et des centres pour le développement et l'éducation des jeunes enfants et enfin, de lutter contre la prostitution des mineurs.

39. S'agissant du rôle des organisations non gouvernementales dans l'éducation, Mme PEFIANCO (Philippines) précise que les écoles privées sont dirigées par des organisations non gouvernementales et supervisées par le Ministère de l'éducation. 5 % des écoles élémentaires sont privées et cette proportion s'élève à 30 % et à 85 % dans le secondaire et le supérieur, respectivement. En ce qui concerne l'enseignement dispensé hors établissements scolaires, un projet des pouvoirs publics, géré par des organisations non gouvernementales, est doté d'un crédit de 25 millions de dollars. Enfin, il existe un programme d'alphabétisation, financé par les autorités, dirigé par une organisation non gouvernementale. L'aide publique aux organisations non gouvernementales comporte également des subventions et des programmes de formation à l'intention des enseignants des secteurs public et privé. Les fonds alloués par le Ministère de l'éducation, de la culture et des sports, qui a sous sa tutelle 15 millions d'écoliers du secteur public, représentent 13 % du budget, pourcentage supérieur à la part allouée à la défense. 5 % du produit national brut sont consacrés à parts égales à l'enseignement privé et à l'enseignement public.

40. Aux Philippines, 79 dialectes ou langues nationales sont parlés, selon une étude de l'organisation non gouvernementale Summer Institute of Linguistics, dont le Ministère de l'éducation, de la culture et des sports est membre. Dans l'enseignement, le bilinguisme est la règle : certaines matières sont enseignées dans une des langues nationales, d'autres en anglais. Il faut reconnaître toutefois que les autorités n'ont pas complètement résolu le problème complexe que constitue la multiplicité des langues nationales. Toutefois, la Commission de la langue nationale, créée il y a 25 ans, s'y emploie et l'utilisation des langues vernaculaires dans les écoles primaires est encouragée.

41. Mme LUCIANO (Philippines) ajoute que dans les régions du sud du pays, où vivent des communautés musulmanes, des écoles coraniques (madrassa) ont été établies.

42. Mme PEFIANCO (Philippines) précise qu'il existe pour ces régions du sud, notamment dans une des régions autonomes, un service spécial du Ministère de l'éducation, de la culture et des sports, qui veille à ce qu'il soit dûment tenu compte, dans l'enseignement, de la culture de ses habitants.

43. Mme BALANON (Philippines) souligne que le Ministère du développement et du bien-être social travaille étroitement avec un ensemble d'organisations non gouvernementales qui se consacrent à la promotion des droits de l'enfant, en particulier à la lutte contre la prostitution enfantine et avec les filiales du Royaume-Uni, des Etats-Unis et du Japon de l'organisation Save the Children. Un mémorandum d'accord a été signé entre Save the Children (Japon) et les pouvoirs publics afin de venir en aide aux enfants de père japonais et de mère asiatique. Une organisation nationale s'occupe également de ces enfants et une autre s'occupe tout particulièrement des enfants de père américain et de mère asiatique. En outre, les pouvoirs publics mettent en oeuvre des stratégies en vue d'associer les organisations non gouvernementales et autres à l'élaboration de politiques et de programmes dans ce domaine. Ainsi, des comités interorganisations ont été créés pour s'occuper notamment du problème des enfants dans les conflits armés et des enfants des rues; ils bénéficient de l'aide de l'UNICEF. De plus, l'Eglise, institution très influente aux Philippines, participe, par le biais d'organisations qui lui sont liées, à un projet national sur les enfants des rues. Enfin, des conférences ont été organisées sur ces enfants pour qu'ils s'y expriment et qu'ils soient mieux informés de leurs droits. Il existe par ailleurs des programmes spécialement conçus pour favoriser la survie, le développement, la santé, la nutrition et l'éducation des enfants.

44. Mme LUCIANO (Philippines) rappelle le rôle que joue le Conseil pour le bien-être de l'enfant dans l'application de la Convention. A l'avenir, les autorités travailleront plus étroitement avec la coalition des ONG qui s'occupent du développement quand elles désigneront les nouveaux membres du Conseil. Le Ministère du travail et de l'emploi met des fonds importants à la disposition des organisations non gouvernementales qui oeuvrent dans le domaine du travail des enfants. Les syndicats peuvent disposer de ressources au titre du fonds de l'Organisation des travailleurs et du fonds du programme de développement alloués en vertu de la loi de finances.

45. Se référant à l'article 4 de la Convention, Mme Luciano souligne qu'aux Philippines, 40 % de la population vivent dans la pauvreté. Certes, le taux de croissance économique aux Philippines est élevé; de 5,9 % en 1994, il devrait dépasser les 6,5 % en 1995. Mais il reste à savoir si les secteurs les plus pauvres de la population en bénéficieront. Il est prévu d'entreprendre un plan d'action sociale dans les 19 provinces les plus pauvres du pays et des crédits importants seront alloués par le Ministère du bien-être social à cet effet.

46. A propos de la publicité faite au rapport des Philippines au Comité, Mme Luciano précise que le rapport est porté à la connaissance des secteurs intéressés et, par l'intermédiaire des organes d'information, à la population. De plus, les responsables du développement social et les dirigeants des provinces et municipalités ont présenté récemment leurs propres rapports sur la manière dont ils avaient atteint les objectifs fixés pour la mi-décennie en matière de promotion de l'enfance. Par ailleurs, les rapports que les autorités adressent à ce sujet au Parlement leur permettent de rendre compte de l'utilisation du budget.

47. Mme REODICA (Philippines) dit, au sujet de la diversité culturelle de son pays, que les stratégies, activités et directives du gouvernement sont appliquées en fonction des situations locales. Depuis l'adoption du Code des autorités locales, celles-ci, désormais, planifient leurs programmes et utilisent leurs ressources en toute autonomie. Toutefois, les organes nationaux continuent d'apporter leur assistance technique et augmentent leur aide financière dans la mesure du possible.

48. Mme Reodica, travaillant au Ministère de la santé, peut témoigner que le gouvernement reconnaît le rôle important que jouent les organisations non gouvernementales dans le secteur de la santé. Dernièrement, il a été aussi fait appel aux organisations non traditionnelles qui travaillent au niveau des communautés de base. Le Ministère de la santé a affecté aux programmes relatifs à la survie et au développement de l'enfant, pour la prochaine décennie, environ 20 % des 28 milliards de pesos alloués à la mise en oeuvre des programmes d'investissements publics. Pour ce qui est de la surveillance des réalisations accomplies dans le domaine de la santé des enfants, des enquêtes sont menées au niveau national, notamment en matière de démographie et d'alimentation, ainsi que sur les ménages.

49. M. CONFERIDO (Philippines), appartenant au Ministère du travail et de l'emploi, traitera de la question du travail des enfants. Les organisations non gouvernementales luttent contre ce fléau et les syndicats jouent aussi un rôle important, notamment le Congrès des syndicats des Philippines. Toutefois, ces syndicats représentent à 80 % le secteur industriel et la production manufacturière, alors que 70 à 80 % des enfants au travail sont employés dans le secteur agricole et informel. Il faut souligner que les syndicats ont la volonté de lutter contre le travail des enfants. Des mesures ont été prises pour essayer d'empêcher le recrutement d'enfants dans les provinces pour des emplois dans les centres urbains. En 1994, sept opérations de sauvetage ont été menées et d'anciennes victimes de cette exploitation se sont rendues dans les provinces où elles avaient été recrutées pour convaincre les parents de s'opposer au recrutement de leurs enfants. Ces équipes d'enfants ont aussi surveillé le versement des indemnités dues aux enfants et ont joué un rôle dans les démarches faites en vue de poursuivre pénalement les responsables de violations. Ainsi, toutes les petites victimes sauvées lors des opérations de 1994 ont été indemnisées et actuellement trois affaires pénales sont instruites contre des employeurs.

50. Mme GUTIERREZ (Philippines), qui est membre du Ministère de la justice, rappelle qu'en vertu d'une loi adoptée en avril 1992, des indemnisations peuvent être versées aux enfants victimes de violences physiques et psychologiques. En avril 1994, 65 enfants en avaient bénéficié.

51. S'agissant de la diffusion des droits de l'enfant, le Centre des droits de l'enfant et la Commission des droits de l'homme mettent en oeuvre un programme d'information pour le grand public.

52. Mme LUCIANO (Philippines) signale qu'un programme de réforme sociale, destiné à apporter plus de ressources en matière sociale, a été lancé afin de mieux mettre en oeuvre la Convention. La diffusion de la Convention reste une difficulté majeure dans un pays formé de 7 100 îles. Il conviendrait de renforcer le rôle de la presse à cet égard. Le Président de la République a, dans un mémorandum, recommandé à chaque administration de veiller à ce qu'il soit tenu compte de la Convention dans les divers programmes et directives àl'échelle nationale.

53. La PRESIDENTE demande aux membres du Comité s'ils souhaitent des éclaircissements sur les réponses apportées par la délégation philippine.

54. Mme SANTOS PAIS souligne l'importance des rapports sur l'application de la Convention et constate que les autorités philippines s'efforcent d'évaluer les progrès accomplis par rapport aux objectifs fixés. Toutefois, si la vérification de l'utilisation des ressources budgétaires est certes importante, il est également essentiel de sensibiliser les parlementaires sur les groupes de population qui méritent une plus grande attention. La présentation du rapport au Parlement pourrait être l'occasion d'une information à ce sujet.

55. Ayant relevé qu'à l'issue d'une réunion ministérielle importante il avait été jugé nécessaire de prendre des mesures pour accroître de 20 % les budgets sociaux, Mme Santos País voudrait savoir quelle suite a été donnée à cette recommandation.

56. M. KOLOSOV, se référant à l'adoption par le Gouvernement philippin de lois qui prévoient des peines sévères pour les sévices sexuels et l'exploitation économique des enfants, appelle l'attention sur le fait que la rigueur des peines a souvent pour effet d'inciter à cacher la réalité au point que, par exemple, dans les pays développés, les autorités estiment que, pour traduire la réalité, on devrait multiplier par dix le nombre de cas de viols connus. Ce qu'il faut donc c'est prévenir les situations de conflits et changer les attitudes. Dans ce domaine, les activités des ONG et des travailleurs sociaux sont essentielles. La Convention a été élaborée parce que l'enfant est un être fragile qui doit être traité avec des égards très particuliers. M. Kolosov aimerait savoir comment la société philippine s'est engagée dans cette direction, quatre ans après la ratification de la Convention.

57. La PRESIDENTE demande pourquoi le vagabondage de mineurs est un délit pénal et souhaiterait avoir des précisions sur les poursuites pouvant être engagées suite à des actes de violence. Elle aimerait également savoir si le fait d'être musulman ou de parler uniquement l'un des 79 dialectes recensés dans le pays a une incidence sur les perspectives d'emploi.

58. Mgr BAMBAREN GASTELUMENDI se demande si le texte de la Convention relative aux droits de l'enfant a été diffusé dans les différents dialectes. Il se déclare préoccupé par le pourcentage élevé de la population rurale (47 %), sa marginalité et sa situation de pauvreté. Constatant qu'un grand nombre des actes de violence sexuelle dont sont victimes des enfants sont commis au sein des familles, et notamment des familles marginalisées, il aimerait savoir si des tribunaux chargés de la protection des mineurs et des mécanismes de défense de leurs droits, tels qu'il en existe dans les zones urbaines, ont été institués dans les différentes îles. Enfin, il se demande si la politique agricole, de plus en plus axée sur l'exportation, n'est pas menée au détriment de la famille et de ses traditions.

59. Mme C.A. DE LEON (Philippines) précise que dans le cadre de la stratégie de décentralisation, des ressources, dont une grande partie est utilisée pour le développement social, sont disponibles au niveau local. Elle reconnaît qu'il existe davantage de mécanismes de défense des droits de l'enfant dans les zones urbaines, car celles-ci disposent de plus de ressources et les organisations non gouvernementales y sont plus actives. Il arrive souvent que les cas de violence sexuelle dans les familles ne soient pas dénoncés car les victimes ont honte. En outre, dans les zones rurales, les familles ignorent les mécanismes qui sont à leur disposition ou sont trop éloignées des zones urbaines où ces mécanismes sont concentrés. Il conviendrait de créer davantage de mécanismes de défense des droits de l'enfant dans les régions rurales. A cet égard, le Président de la République a créé une Commission pour le développement rural chargée de traiter des problèmes spécifiques aux zones rurales, d'informer les populations rurales et d'assurer un développement respectueux de l'environnement.

60. La PRESIDENTE invite la délégation philippine à répondre aux questions écrites du Comité relatives à la définition de l'enfant (CRC/C.7/WP.3), qui se lisent comme suit :
"Définition de l'enfant
(Article premier de la Convention)

61. Mme C.A. DE LEON (Philippines), répondant à la question No 8, précise que pour la qualification du viol, un enfant de 12 ans est considéré comme une personne innocente qui est incapable de donner volontairement son consentement et de faire preuve de discernement vis-à-vis de l'acte sexuel. Quant à la raison pour laquelle les personnes âgées de moins de 18 ans ne peuvent se marier, c'est qu'on les considère trop jeunes pour comprendre ce que représente le mariage.

62. Mme LUCIANO (Philippines), précise que lorsqu'un enfant âgé de 12 ans ou plus jeune est victime d'un viol, il n'est pas nécessaire de prouver qu'il y a eu contrainte, intimidation ou consentement car on estime qu'à cet âge, un enfant ne peut se protéger de son agresseur et n'a pas le discernement ni les capacités nécessaires pour parer à l'agression. En revanche, s'il s'agit d'un enfant de plus de 12 ans, on considère qu'il a les capacités de repousser des avances et qu'il faut donc établir la preuve qu'il n'y a pas eu consentement de sa part.

63. Mme C.A. DE LEON (Philippines), passant à la question No 9, fait observer que des personnes autorisées à célébrer des mariages, qui vivent dans des régions isolées, ne sont parfois pas au courant de la disposition du Code de la famille fixant à 18 ans l'âge minimum pour contracter mariage et continuent à célébrer des mariages, alors que l'un des futurs conjoints, quand ce n'est pas les deux, a moins de 18 ans.

64. En réponse à la question No 10, Mme C.A. de Leon indique qu'il n'a pas été fixé d'âge minimum pour le consentement à des relations sexuelles, mais qu'en principe l'âge minimum devrait être le même que celui du mariage, c'est-à-dire 18 ans. De même, il n'y a pas d'âge minimum prévu, autre que celui de la majorité, pour pouvoir demander des conseils juridiques et médicaux sans le consentement des parents.

65. Enfin, pour ce qui est de l'obligation scolaire (question No 11), Mme Alma de Leon précise qu'aucune mesure n'a été prise pour faire coïncider l'âge auquel l'enfant termine en général ses études primaires obligatoires (12 ans) avec l'âge minimum d'admission à l'emploi (15 ans). Cela étant, les enfants âgés de moins de 15 ans peuvent travailler avec l'autorisation de leurs parents ou tuteurs, à condition de ne pas effectuer de travaux dangereux ou qui compromettent leur éducation.

66. Mme PEFIANCO (Philippines) fait observer que les Philippines sont l'un des six pays au monde où l'enseignement de base ne dure que dix ans alors que dans les autres pays il dure 12 ans. Les autorités essaient de résoudre ce problème. La scolarité se compose d'un enseignement élémentaire gratuit et obligatoire qui dure six ans et d'un enseignement secondaire, gratuit depuis 1989, d'une durée de quatre ans. Les autorités s'efforcent de veiller à ce qu'il y ait des écoles publiques élémentaires dans presque tous les villages et des écoles secondaires dans pratiquement toutes les municipalités avant d'envisager de rendre l'enseignement secondaire obligatoire.

67. Mme C.A. DE LEON (Philippines) fait observer que l'âge minimum d'admission à l'emploi est de 15 ans et qu'en général les enfants entrés à l'école primaire à six ans terminent leurs études secondaires et peuvent avoir un emploi à 16 ans.

68. La PRESIDENTE, relevant que de nombreux enfants arrêtent leurs études après l'école primaire, à l'âge de 12 ans, se demande ce qu'ils font entre 12 et 15 ans puisque, selon la loi, ils ne peuvent avoir un emploi.

69. Mme BELEMBAOGO demande si les Philippines ont ratifié la Convention de l'OIT concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi.

70. M. CONFERIDO (Philippines) indique que les Philippines ont ratifié la Convention 59 de l'OIT fixant l'âge minimum d'admission des enfants aux travaux industriels, mais pas la Convention 138 concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi. Toutefois, les dispositions du Code du travail, en particulier ses articles 139 et 140, sont conformes aux dispositions de la Convention 138 de l'OIT. Le Gouvernement philippin envisage la possibilité de ratifier cette convention, mais veut s'assurer au préalable qu'il pourra prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir son application.

71. Mme SANTOS PAIS se demande avec inquiétude comment il est possible de connaître et de contrôler la situation de l'enfant si l'on ne détermine pas jusqu'à quel âge l'école est obligatoire. Elle rappelle qu'aux termes de la Convention, l'enfant ne doit être astreint à aucun travail susceptible de compromettre son éducation ou de nuire à sa santé. Or, le Comité a été informé que de nombreux enfants travaillaient dans le secteur informel et dans le secteur agricole où les contrôles sont très difficiles à effectuer. Mme Santos País se demande quelles mesures les Philippines pourraient prendre pour inciter les enfants à rester à l'école et éviter que les parents qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté ne soient contraints d'utiliser leurs enfants pour accroître le revenu de la famille. S'agissant de la question de l'assistance juridique, Mme Santos País rappelle que d'après le rapport des Philippines (CRC/C/3/Add.23), les enfants, quel que soit leur âge, peuvent témoigner en justice à condition d'être capables de s'exprimer, d'agir avec discernement et de supporter les contraintes physiques et mentales qu'implique la procédure judiciaire. Elle voudrait savoir si les mineurs qui témoignent en justice peuvent bénéficier d'une assistance juridique. De même, elle souligne combien il est important que les enfants victimes de violences sexuelles puissent bénéficier systématiquement d'une assistance. Relevant par ailleurs qu'un enfant peut voir sa responsabilité pénale engagée dès l'âge de neuf ans, elle se demande si cela n'est pas trop jeune et, là encore, si le mineur bénéficie d'une assistance juridique et d'une préparation avant d'être déféré au tribunal.

72. Mgr BAMBAREN GASTELUMENDI fait observer que le nombre élevé de cas de violences sexuelles au sein de la famille est un problème très grave qui exige la mise en place d'un système de protection de l'enfant. S'agissant de l'enseignement, il se déclare préoccupé par le pourcentage très élevé d'enfants qui ne poursuivent pas leurs études secondaires et qui risquent d'être exploités sur le marché du travail.

73. Mme C.A. DE LEON (Philippines) souligne l'importance du rôle des organisations non gouvernementales dans la protection des enfants qui ne peuvent continuer à aller à l'école après avoir achevé leurs études primaires. Elle cite à cet égard le programme de recherche pour le développement de l'enseignement mis en oeuvre aux Philippines par une organisation non gouvernementale pour inciter les enfants à rester à l'école.

74. Mme LUCIANO (Philippines) précise que si les mineurs doivent parfois témoigner en justice, ils bénéficient toujours de l'assistance d'un avocat et de travailleurs sociaux. En outre, les parents doivent en principe être présents à l'audience. Pour ce qui est de la responsabilité pénale, elle ne peut être engagée en fait qu'à partir de l'âge de 12 ans car l'on estime qu'à cet âge, le mineur peut faire preuve de discernement et distinguer le bien du mal.

75. Mme BALANON (Philippines) précise que lorsqu'un mineur victime de violence sexuelle est appelé à témoigner, des travailleurs sociaux et son avocat lui font visiter le tribunal pour qu'il se familiarise avec les lieux et l'informent de la procédure et des questions qui pourront lui être posées. D'après les statistiques dont disposent les autorités philippines, 45 % des violences sexuelles seraient des viols, 22 % des actes d'inceste, et 7 % des attentats à la pudeur. Seuls 2 % des cas ont abouti à une condamnation; 57 % des mineurs victimes de ces violences sont âgés de 13 à 18 ans, le plus jeune avait un an et dix mois. Les auteurs sont en général des personnes de l'entourage des enfants : le père (dans 13 % des cas), un voisin (11 %), un parent (10 %), le beau-père (5 %); 93 % des victimes sont des filles, les 7 % restants, des garçons victimes de pédophiles. S'agissant de la pédophilie, il y a eu 44 arrestations - chiffre record - en 1988-1989 et 11 depuis 1991. Dans deux cas, les accusés ont été condamnés, et trois cas sont en instance. Pour ce qui est de l'inceste, il est très difficile d'amener les familles àintenter une action en justice car cela reste un secret. Grâce à la loi No 76.10 promulguée en 1992, un travailleur social, le chef d'un village ou une organisation non gouvernementale peuvent porter plainte pour l'enfant si ses parents ne le font pas. Deux affaires présentées ainsi par des tiers sont en instance. La longueur de la procédure constitue toutefois un grave problème car elle tend à décourager tous ceux qui veulent porter plainte. L'inceste a souvent pour origine l'alcool, la drogue et le fait que les enfants sont laissés seuls avec leur père lorsque la mère part travailler dans une autre île. Dans un cas précis, le père a pensé qu'il devait apprendre les choses de la vie à son enfant et dans un autre, la mère, estimant qu'elle ne satisfaisait pas son mari sur le plan sexuel, ne s'est pas opposée àl'inceste.
La séance est levée à 13 h 5.

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